Un lion aperçut une chèvre qui paissait sur le haut d'une roche escarpée de tous côtés. Sitôt qu'il eut reconnu que le lieu où il la voyait était inaccessible : Ma mie, lui cria-t-il d'une voix officieuse, que faites-vous donc là haut grimpée sur des rochers, où vous ne pouvez brouter qu'une mousse fort insipide. Vous feriez beaucoup mieux, ce me semble, de descendre dans la prairie où je pais ; l'herbe y est tendre, et d'un goût exquis. Descendez, vous dis-je encore une fois. Ami, répondit la chèvre, c'est ce que je vais faire très-volontiers ; mais bien entendu, ajouta-t-elle avec un sourire moqueur, lorsque je ne t'y verrai plus.
Le lion à la chèvre offre un bon pâturage ;
Mais en vain. Celle-ci fut sage,
De ne se fier qu'à demi
Aux beaux discours d'un ennemi.
Une oie pondait tous les jours un oeuf d'or à son maître : celui-ci s'imagina que l'oiseau en était tout plein. Dans cette pensée, il le prend, le tue, et lui ouvre le corps ; mais quel fut son désespoir, lorsqu'il n'y trouva rien de ce qu'il y cherchait!
Pour vouloir trop avoir, on perd tout. Je l'ai dit,
Je le répète encor ; mais qui peut d'un avare
Assouvir ici-bas la passion bizarre ?
Quel trésor, quel Pérou jamais le satisfait ?
Le léopard prétendait avoir de grands avantages sur le renard : Remarque bien, lui disait-il, la beauté de ma peau ; vois comme elle est luisante, tachetée et mouchetée. Ami, de bonne foi, penses-tu que, de la tienne à la mienne, il puisse y avoir l'ombre de comparaison ? J'en vois si peu, repartit le renard, que je t'avouerai franchement que je me croirais fort au-dessous de toi, si je ne savais que les connaisseurs font un peu plus de cas de l'esprit que de la peau.
Le renard eut raison ; son sentiment décide
Un point que le beau sexe a souvent contesté.
Mieux vaut l'esprit que la beauté :
L'un a plus de brillant, l'autre plus de solide.